Infobésité : je m'appelle Gatien, je suis infobèse mais je me soigne
Témoignage
Hier soir, dans le local à l'arrière du centre culturel
Crédits photo : Dylan Roscover on Flickr - CC-BY-SA
Dessin : Éric Grelet - CC-BY-SA
Hier soir, dans le local à l'arrière du centre culturel
- Moi : Bonjour à tous, je m'appelle Gatien et je suis infobèse
- En coeur : Bonjour Gatien !
- L'animateur : Gatien peux-tu nous raconter ton parcours ?
- Moi, reprenant une respiration profonde : Je suis un passionné inconscient... Je suis terriblement frustré de ne pouvoir suivre le flux d'informations qui émanent du monde chaque jour, chaque heure, chaque seconde. Impliqué dans de nombreux réseaux et curieux de nature, je lisais les revues, les derniers ouvrages, j'écoutais la radio... Jusqu'à il y a peu, je gérais... puis est arrivé internet, Twitter, les podcast, les webzines, les newsletters, les alertes Google, les flux RSS... la palette des possibles s'est élargie et les sujets passionnants se sont multipliés. C'était euphorique au début mais rapidement la frustration a gagné du terrain... Trop d'informations intéressantes m'échappaient, je papillonnais sans jamais approfondir. La joie d'être baigné en permanence dans le flux culturel s'est transformé en noyade :
- L'animateur : Gatien quel était ton sentiment à ce moment ?
- D'une voix tremblotante : J'étais très frustré... En colère aussi contre moi-même de ne pas pouvoir suivre le rythme.
- L'animateur : Tu penses vraiment que c'eut été possible ?
- Me reprenant : Non, rapidement j'ai compris que même en sollicitant tous mes neurones, il me serait impossible de faire face à cette vague tous les jours un peu plus grande. C'est un sentiment désagréable... J'avais secrètement espéré en être capable.
- L'animateur : Qu'est-ce que tu as fait à ce moment là ?
- Moi : Dans un premier temps, j'ai cherché à m'organiser. J'étais certain que ce petit passage à vide pouvait être résolu par une meilleure organisation. J'ai automatisé le tri des mails dans ma boîte mail. Je me suis désabonné à diverses newsletters, j'ai organisé mes flux RSS et me suis astreint à n'ouvrir que les articles qui paraissaient vraiment pertinents, j'ai réduit mon utilisation de Twitter...
- L'animateur : Et ?
- Moi : Bon comment dire, oui il y a eu quelques effets positifs à cette organisation. C'est redevenu, disons, gérable.
- L'animateur : Tu n'as pas l'air plus satisfait que ça ?
- Moi : Je finis par me demander si l'infobésité n'est pas en fait un trait de caractère...
- L'animateur : Ah bon ? tu nous expliques ça ?
- Moi : Plus j'y réfléchis, plus je me dis que j'étais déjà infobèse et ce même avant internet. Vous savez les livres qui s'accumulent à côté de votre lit plus vite qu'il ne vous est possible de les lire... Ça c'était déjà avant internet. Je crois que la curiosité, l'envie d'apprendre rend infobèse. Après on essaie juste de limiter cette infobésité pour que le niveau de frustration reste raisonnable. Et là internet ne rend franchement pas les choses faciles. Bien sûr, l'information y est abondante mais l'information est aussi abondante dans les bibliothèques... Ce qui pour moi fait la différence, c'est la sérendipité...
- L'animateur : La sérendipité, là, je vois pas...
- Moi : Quand je suis sur internet à la recherche d'une info sur un sujet précis qui m'intéresse, il est trop facile, beaucoup trop facile de tomber par hasard sur un nouveau sujet peu connu, voire inconnu, et qui, nom de dieu, mérite votre attention... Et voilà... Le piège se referme, d'un sujet intéressant, je passe à deux... D'une personne à suivre sur Twitter, je passe à deux, d'un flux RSS à suivre je passe à deux... J'ai beau trier et trier encore en aval, c'est en amont que doit se faire le travail.... Et là c'est terriblement compliqué. Surtout quand on est curieux de nature.
- L'animateur : Et donc ?
- Moi, de nouveau la voix tremblante : Et bien je suis toujours infobèse... Je crois que j'ai pu limiter les dégâts mais mon niveau de frustration reste élevé. J'ai quand même appris à relativiser, à "fermer la boutique" de temps à autre, à me dire que si l'info est vraiment importante elle repassera, à me placer dans le flux plutôt que de chercher à le capter... Je crois que c'est un bon début. J'ai encore des progrès à faire mais vous allez m'aider ? N'est ce pas ?
- En coeur : Bravo Gatien, tu peux compter sur nous.
Quelques trucs pour gérer l'infobésité
- Faire un tri dans ses abonnements newsletters... Celles que vous ne lisez pas vraiment = au bac.
- Organiser sa boîte mail et mettre en place un tri automatique pour ne garder "visible" que les mails importants ou urgents
- Limiter ses abonnements flux RSS aux sujets qui vous intéressent vraiment
- Ne pas chercher à être à tout prix à jour dans la gestion de ses flux RSS, ce qui est vieux de plus de 5 jours n'est plus "important" (en tout cas dans de nombreux sujets... Á vous de voir lesquels)
- Prévoyez un moment précis dans la journée pour gérer votre infobésité... Le reste de la journée, organisez-vous pour ne plus être "dérangé" par l'afflux d'infos.
- Ne créez pas vous même d'infobésité chez les autres. Ne re-scoopez, re-twittez, relayez que ce qui est vraiment opportun
- Partagez votre infobésité et appuyez-vous sur des amis-collègues pour diminuer votre infobésité personnelle. Si chacun veille sur un sujet et fait le tri dans le bruit, et que ce travail est partagé, c'est tous les membres du groupe qui voient leur infobésité diminuer.
Crédits photo : Dylan Roscover on Flickr - CC-BY-SA
Dessin : Éric Grelet - CC-BY-SA
Auteur de la fiche
Gatien Bataille
Licence d'utilisation la ressource
CC BY SA
Contributeur.trice.s ayant vécu cette action
Outil numérique expérimenté
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